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A plat la triploïde ! Tant va l'huître à l'Ifremer qu'à la fin...

 

 

Pour la lecture de ce récit, je vous aurais volontiers, dans un premier temps, conseillé une petite dégustation d'huîtres N°4 servies sur de la glace, avec un trait de jus de citron, le petit vin blanc qui va bien avec, et également accompagnées, comme de coutume sur le bassin d'Arcachon semble-t-il, du Lou Gascoune (leur pâté Hénaff à eux). C'est tout du moins ce que je vous aurais conseillé avant de me lancer dans ces quelques petites recherches... en fond musical, je vous aurais proposé « le petit bal perdu » interprété par Bourvil - http://www.youtube.com/watch?v=zvP3FJfPgx8 – là, pour le coup, c'est une valeur sûre : à conserver...

 

 

Samedi 3 août 2013. Quelque part sur une commune du Lot, Midi-pyrénées, France

 

J'avais alors quitté le finistère, pleine de cette belle idée d'être en vacances (j'adore être en vacances ! Mais alors là. Qu'est-ce-que j'adore être en vacances). Pas d'idée précise pour autant sur ce que j'allais faire si ce n'est que je décidais de me baser quelques temps dans une rikiki commune du Lot : là où, tenez-vous bien, on peut ne pas apercevoir de fils électriques, là où les cigales s'en donnent à coeur joie (je me suis, à cette occasion, demandée si elles mettaient en place des quarts de chant afin de se relayer... parce que, à leur place, je me serais vrillée les cordes vocales depuis longtemps. Ah ! On me signale en haut lieu qu'une cigale, ça ne chante pas avec des cordes vocales mais ça cymbalise avec une membrane qui se déforme sur son abdomen. Et puis, c'est le monsieur cigale qui chante. Argh ! Qui cymbalise... oui enfin, en même temps, vu de loin...). Pas de fils électriques en vue donc, des cigales et... des papillons. Oui. Des papillons à profusion. Moi qui pensais, n'en ayant vu depuis la st Glinglin, qu'ils avaient disparus. Ils sont là, dans le lot. Trop jolis. Ce serait quand même plutôt pas mal d'en revoir par chez nous...

 

Alors voilà, je ne sais pas trop bien comment m'est venue cette idée de faire le tour du bassin d'Arcachon en vélo. Parfois, je crois que j'ai les neurones qui s'touchent et des fois, ça fait juste de la fumée, et des fois, ça fait une idée. Là, en l'occurence, je crois me rappeler que j'avais patiemment entrepris d'ôté du pelage du terre-neuve les à peu près 2000 petites boules qu'il avait glané lors d'une de ses balades d'observation du biotope lotois (vous savez ? Ces petites graines rondes genre velcro qui s'accrochent dans vos cheveux pour un peu que, pris d'une minute de folie à votre arrivée en vacances, il vous ai pris l'envie de faire des roulés-boulés dans les champs? Ah ? Vous ne faites pas ça vous ? Tiens ?) Enfin bref, j'étais donc en train de tenter de redonner forme canine au chien et je voyais déjà le chat passer en arrière plan, lui aussi transformé en boulette de velcro géante. Alors peut-être que c'est l'idée d'y passer mes vacances qui ne m'a qu'à moitié emballée mais c'est à ce moment précis il me semble qu'a émergée l'idée de faire le tour du bassin d'Arcachon en vélo (les sacoches d'un vélo n'étant point faites pour transporter un terre-neuve – le chat tout au plus aurait pu y tenir ; le risque étant alors qu'il lance une attaque « à sa façon » - je préférais les laisser en bonne compagnie ; eux aussi pouvaient prétendre après tout, à quelques vacances).

 

J'avais toujours jusqu'ici, je ne sais pourquoi, navigué au large du littoral du sud-ouest de la france. Après m'être longtemps dit que, de toutes façons, les paysages ne pourraient en aucun cas rivaliser avec ceux de ma chère Bretagne, j'avais encore tout un panel de griefs à l'encontre du sud-ouest : le littoral, ou bétonné (à l'image de st jean de mont) ou tout plat tout plat ; les routes en lignes droites à n'en plus finir (« c'est quand qu'on arrive ? ») ; des bouchons pour y aller ; des bouchons pour en revenir ; des plages dangereuses (je nage comme un potiron), et the gros point noir quand même : plus moyen de se faire servir du beurre demi-sel, même en se roulant par terre. Alors là, c'était l'pompon !

 

Mais bon, tout cela, c''était sans compter sur ce point bien ancré de mon caractère (je veux dire : en plus de la tête-de-pioche) : la curiosité. Peut-être qu'aussi le manque de soleil cette année m'a rappelé à quel point l'accent du sud est sympathique à entendre (mais oui ! l'accent des penn sardin de Douarnenez également... dans un autre genre dirons-nous...). Peut-être bien que je me suis souvenue avoir entendu parler des petits ports du bassin d'arcachon et aussi, et surtout d'ailleurs, le bassin d'arcachon fait partie d'un parc régional, celui des landes de Gascogne et personnellement, sans m'en rendre compte tout d'abord et sans véritable explication, j'ai toujours eu tendance à atterrir dans les parcs régionaux pendant mes vacances (un bon psy m'en donnerait peut-être la raison mais à bien y réfléchir, je vais en faire l'économie)

 

Voilà donc où j'en étais avant de me souvenir que je n'ai jamais vraiment été équipée pour le sport (me reviennent à cette évocation quelques images douloureuses de cours de sport au collège : plats dans la piscine, gamelles à vélo - celles avec les p'tits graviers bien coincés sous la peau des genoux - de cheval d'arcachon, euh... d'arçon -p'tain d'écriture intuitive- raté). On ne peut pas vraiment dire que mes muscles soient atrophiés non plus mais je me demandais bien comment j'allais endurer les 100 km du bassin d'Arcachon ? Hors de question de prendre un vélo nucléaire (euh... électrique pardon !) : le chemin ne dépassant pas 3 mètres du niveau de la mer, j'aurais eu un peu honte quand même. C'est alors que m'est apparue une idée lumineuse. Euh... non, en fait. C'est d'autres personnes qui ont eu une idée lumineuse...

 

Je ne suis pas de celles qui font l'apologie de la pub ; bien au contraire, je la crois responsable de bien de nos maux. Mais là, pour le coup, mes « gentils organisateurs » de balades à vélo méritent un coup de pouce (écrit-elle comme si son avis pouvait avoir un quelconque impact ! Avec ni compte tweeter, ni compte facebook et une notoriété de chanoines du chapitre de Saint-Paul-de-Fenouillet, la courgette et ses 0 « followers » (j'crois que c'est comme ça qu'on dit) est plutôt mal placée pour la ramener. La toute jeune équipe de Bassin Tour (http://www.bassintour.com/fr) aurait dès lors le nez fin de remettre l'acquisition de sa notoriété entre les mains de personnes plus compétentes.

 

Pour autant, j'ai donc pris contact avec ce charmant couple d'Andernos qui vient de lancer une petite entreprise bien sympathique sur une idée super trop chouette pour ménager mes muscles et découvrir le bassin (Certains diraient que j'ai toujours eu tendance à m'emballer mais là, de fait : je suis emballée). Je ne saurais dire si c'est une initiative écolo ou pas (les accro à la modernité voulant culpabiliser ceux qui aimeraient faire quelques efforts à ce niveau diraient sûrement qu'ils polluent trop encore) mais quand je vois les flots de circulation évités et les petits endroits traversés, ça m'suffit à me dire que c'est une initiative qui tend à un juste milieu. Alors voilà, je partais à vélo le nez en l'air et le coeur plein d'allant (avec d'autant plus d'allant qu'un campement déjà monté m'attendait chaque soir... en fait : j'ai passé mes premières vacances « de princesse courgette»), prête à ouvrir toutes grandes mes mirettes, à la découverte du bassin d'Arcachon.

 

D'un côté, j'avais les municipalités du bassin de Carcachon, euh... d'Arcachon je veux dire, et leurs pistes cyclables (tant mieux pour moi mais malgré les aménagements, les routes elles, restaient toujours autant « blindées » de circulation) ; de l'autre, le tracé de mes « gentils organisateurs », celui du chemin des écoliers, pas forcément connu des touristes, qu'ils avaient eux, pour habitude d'emprunter. A part donc quelques bizarreries comme cette longue travée bitumée « spéciale cyclistes » dans une forêt de pins et au passage de laquelle je me suis dit que « quand même, je n'en demandais pas tant », d'autant que je cheminais jusque là par 40°c au soleil et que la promesse d'un passage ombragé en forêt m'avait évité de tomber en léthargie ; ma déception fut donc grande en arrivant sur cette cicatrice faite à la forêt qui n'offrait du coup plus rien d'ombre et à laquelle s'ajoutait l'impression de cagnard donnée par l'asphalte qui menaçait lui, du coup, de fondre et de m'avaler à tout jamais (on me dit en haut lieu que j'exagère). Peut-être bien mais je suis plutôt contente d'y avoir survécu. A part donc une ou deux bizarreries, je passais par de magnifiques endroits, proches parfois d'une réserve d'oiseaux, ou encore j'approchais de magnifiques petits ports ostréicoles....

 

Mais là encore... mon destin de courgette me rattrapa !

 

Attablée à une cabane d'ostréiculteur offrant la possibilité de déguster des huîtres - Ah ! Petite précision car un breton averti en vaut bien une demie-douzaine... On peut donc, dans une cabane de dégustation : ou déguster une huître avec son petit vin blanc, ou une huître toute seule, ou une huître avec son jus de citron, ou une huître avec un lou gascoune (le pâté Hénaff local) et un petit vin blanc, mais surtout pas, mais alors surtout pas le petit vin blanc (ou tout autre breuvage d'ailleurs) tout seul... je préfère en parler là maintenant afin de ménager les susceptibilités : il y a donc peu, mais vraiment peu alors, de bistrots en tant que tel dans les ports du bassin d'arcachon ; en fait, à la base, je ne savais pas trop si j'aimais bien les huîtres ou pas (surtout avec la chaleur ambiante ; et puis aussi, on n'est pas un mois en « r ») et j'ai voulu me débiner. Faute avouée...

 

Enfin voilà, j'étais donc attablée dans un endroit tout mignon, en attente de mes huîtres n°4 (celles conseillées à ceux qui n'aiment pas trop trop les huîtres). Le journal du jour trainait sur la table d'à côté et je me mis en quête des info locales. ARGH ! Sujet du jour : l'ostréiculture dans le bassin d'arcachon. Re-ARGH ! Les nouvelles ne sont pas bonnes. Le journaliste y parle en substance des huîtres du bassin qui vont mal avec un fort taux de mortalité ; que certaines, tenez-vous bien, transument par la Bretagne pour y grandir (après, elles rentrent à Arcachon en Prem's vous croyez ?) ; et que d'autres sont carrément triploïdes. Alors là ! Aucune idée de ce que veut dire « triploïdes » mais avouez que ça ne sent pas bon.

 

Je laisse là le papier bien décidée à ne point gâcher le moment présent et remets à plus tard mes investigations... Je rentrais dans le Lot. Euh... bien évidemment pas en vélo. Je ne suis pas devenue sportive comme ça, par enchantement.

 

Je rentrais dans le Lot où m'attendais le terre-neuve en forme de boulette de velcro et entamais mes mini-recherches (« mini» parce qu'internet facilite quand même bien la vie dans ce domaine ; je n'ai donc pas trop eu à me mouiller les pattes ; et puis je ne suis pas du tout sûre qu'à la bibliothèque de Concorès-300-habitants, j'aurais trouvé beaucoup d'ouvrages sur la question). J'encourage d'ailleurs qui le souhaite à faire ses propres recherches car, quand même, on peut lire le tout et son contraire, même chez les scientifiques. Et ça ! C'est quand même un monde ! Faudrait voir à pas nous prendre pour des cornichons (sauf votre respect messieurs) !

 

Il y a donc de quoi s'y perdre... Du coup, pour ce que j'en ai compris : l'Ifremer, institut dont un breton peut se montrer aussi fier que, vous savez ? cette petite boîte de conserve bleue ? Celle dont je préfère taire le nom de peur de me retrouver, avant de m'y attendre, dans une clinique de sevrage... L'Ifremer donc, dont la mission est, entre autre, l'exploitation de la mer (Ah !? A bien y réfléchir, ça peut finalement s'avérer un peu bizarre quand même) a mis au point il y a une quinzaine d'années une « super huître », une huître qui défie les saisons, une huître qui se joue bien de l'écume et autres remous et affronte virus et bactéries avec ses supers pouvoirs. J'imagine tout du moins que telle était l'intention première...

 

Voici donc : un jour, dans un laboratoire d'Ifremer, Monsieur X, éminent scientifique j'imagine, a accouché d'une huître triploïde. Je tiens d'ailleurs à être tout à fait claire, et avant que certains d'entres vous ne crient aux organismes modifiés génétiquement : non non ! Que du tout ! Une huître triploïde n'est pas génétiquement modifiée, elle est chromosomiquement (plus facile à écrire qu'à dire) modifiée « Ah bon ? Tout va bien alors ?! »

 

« Mouais c'est ça ! »

 

Alors pour le coup, me direz-vous, je ne suis pas sortie de St Cyr et le jargon scientifique m'est aussi familié que l'Ouzbek mais permettez-moi quand même d'émettre quelques doutes, d'autant que ce que j'apprenai par la suite n'allait pas contribuer à me rassurer.

 

Au départ, d'après les écrits que j'ai lu du moins, il semble que cette triploïde soit née pour répondre à la demande des Consommateurs, lesquels souhaitaient entre deux parties de pétanque l'été, déguster quelques huîtres, sans pour autant qu'elles furent laiteuses... Il a alors paru plus simple à quelques personnes « bien intentionnées », de jouer du bistouri chromosomique que de tenter d'expliquer aux dits consommateurs comment va la nature et ce, depuis des lustres.

 

« Mouais ! »

 

J'imagine quand même également que cette triploïde répondait, ou devrais-je dire : aurais dû répondre à une questions que tout naturellement je me serais posée si j'avais été courgette-ostréicultrice : « mais comment que j'gagne ma croûte moi au printemps et en été, quand les huîtres sont laiteuses, pile au moment où les touristes débarquent ? »

 

« Mais ça ! »

 

Pour en revenir à nos moutons « en forme de mollusques marins bivalves » , les ostréiculteurs se trouvent aujourd'hui dans une situation critique : les huîtres meurent qu'elles soient triploïdes ou naturelles. Les triploïdes ayant été « mélangées » aux naturelles (histoire peut-être que nous n'y voyions que d'la brume), certains ostréiculteurs, ceux notamment qui restent fidèles à la culture traditionnelle des huîtres, s'insurgent depuis un certain temps déjà. S'insurgent au point qu'en 2012, le Comité National de Conchyliculture « ceci n'est pas un gros mot » organise un référendum, référendum par lequel les ostréiculteurs traditionnels ont voté en majorité pour un moratoire sur l'huître triploïde (son interdiction quoi !)

 

Petite précision tant qu'on y est : l'association « Ostréiculteur traditionnel », qui se bat pour la défense et la valorisation de l'huître née en mer, avait, au préalable, déposé un recours contre Ifremer devant plusieurs tribunaux administratifs – dont celui de Rennes, qui a accepté sa requête -, pour « développement de biotechnologies sans en mesurer les conséquences »

 

Le CNC se donnait jusque début 2013 pour prendre une décision...

 

Et bien voilà... nous sommes z'en août... en août pardon. Je cherche. Je cherche. J'ai beau chercher. Peut-être ai-je du goémon dans les yeux mais je n'ai plus rien trouvé qui puisse concerner de près ou de loin une quelconque décision prise par le CNC ou une autre instance. Que t'chic !

 

Ah ! Permettez-moi de m'inscrire en faux... Au moment où je me relis (armée de mon crayon rouge à la recherche d'éventuelles coquilles – pas des coquilles d'huîtres cette fois) je retourne sur le net une dernière fois et que trouve-je donc (là aussi : plus facile à écrire qu'à dire) : cette lettre que je vous propose de lire ( allez ! Vous vous êtes montrés courageux jusque là)

 

http://upload.ouestfrance.fr/ouest-france.fr/pdf/demission.pdf

 

Oui parce que, comme à mon habitude, n'étant pas courgette-journaliste, j'allais vous laisser là avec peut-être autant de questions que de réponses, comptant à nouveau sur quelques esprits éclairés pour apporter une réponse à mes interrogations. Je ne savais qui incriminer du bigorneau ou de la moule. Alors voilà donc, Monsieur Brest a démissionné. Il a pris sa décision début 2013 comme il l'avait dit. Sûrement en aurait-il espéré une autre mais paradoxalement peut-être, je vois dans sa décision une conclusion positive : M Brest, ainsi que les ostréiculteurs « traditionnels », n'ont pas réussi à infléchir les politiques ; pour autant, ils sont allés au bout de leurs idéaux (je frôle l'envolée lyrique là !). Si les tenants et aboutissants restent obscurs, cette petite aventure m'a permis de découvrir le monde ostréicole et surtout, de me faire ma propre idée. Je sais désormais ce qui se trouve derrière ce tableau un peu idyllique du plateau d'huitres servies sur glace ; je m'en tiendrais peut-être désormais au petit vin blanc qui va avec... ou pas... mais ce sera cette fois, en connaissance de cause. Et qui sait ? Ces consommateurs capricieux qui, aux dires de certains articles, seraient à l'origine de la triploïde (enfin, en même temps, s'il avait fallu m'attendre pour l'inventer...) peut-être bien que ces mêmes consommateurs pourront eux, permettre le retour à une « vraie » huître, une aux supers pouvoirs naturels puisque, au bout du compte, la triploïde ne s'en sera finalement pas si bien sortie ! Dans l'attente, gardez le cap messieurs les ostréiculteurs traditionnels !

 

A plat la triploïde !

 

La courgette rend son tablier.

 

PNO (Petite Note d'Optimisme) : c'était chouette quand même les vacances !

Re-PNO : à mon retour dans le finistère, j'ai vu des papillons !

 

 

Petit bonus - exercice pour la semaine prochaine :

 

Prenez connaissance de ce document http://www.coquillages.com/

et surlignez :

 

- les passages qui traitent de l'huître triploïde

- les passages où on nous prend pour des cornichons

 

 

 

 

 

 

 

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